8- Investigations

Publié le 17 Mars 2013

Je me suis donc rendu à la fac, mais je n'ai cependant pas eu le courage d'aller en cours. Ça c'est joué à pas grand-chose. Au lieu de ça, j'ai opté pour une journée à la bibliothèque afin de faire quelques recherches sur Abrahel. Première constatation: les bibliothèques universitaires sont fort peu pourvues en ouvrages consacrés à la démonologie. Enfin, à force persévérance, j'ai fini par dénicher une encyclopédie où son nom apparaissait. Il s'avéra qu'Abrahel avait raison sur un point: son existence n'était guère passionnante. Son principal fait d'arme remontait au XVIème siècle; elle était apparue dans un village paumé et elle avait tué le fils d'un berger qui s'était épris d'elle (je notai au passage que son aversion pour les enfants datait déjà de quelques siècles), puis elle avait plus ou moins ramené à la vie l'enfant en question. En fait, il semblerait qu’elle ait plutôt pris possession du corps pourrissant du fils, d'où un succès mitigé auprès du berger qui se trouva vite incommodé par l'odeur. Abrahel aurait fait ensuite quelques apparitions au cours des siècles suivants, mais sans vraiment accomplir quoi que ce soit de très notable. Il était mentionné qu'elle était une succube appartenant à la catégorie des démons de rang inférieur. Les connaissances sont plus que limitées en termes de hiérarchie de démon, mais je suppose qu'être un "démon de rang inférieur", c'est pas ce qu'il y a de plus classe.

Je craignais alors de devoir revoir à la baisse mes projets d'asservissement de l'humanité.

Je tentai cependant de tirer un trait sur cette petite contrariété alors que je rentrais chez moi (ou plutôt chez mes parents, comme l'aurait sarcastiquement fait remarquer Abrahel). Lorsque j'entrai dans ma chambre, elle était debout devant mes étagères, en train visiblement d'inspecter ma collection de livres et de CDs.

- Tu as un best-of de Britney Spears?! s'exclama-t-elle, tandis que je la saluais.

- Non... Enfin si. Mais c'est pas ce que tu crois...

- Ah, la jaquette ne correspond pas au disque qu'il y a dedans...

- Mmmm, si.

- C'est pas ton disque alors?

- Si. Bon, peut être que c'est ce que tu crois, finalement. Mais peu importe, parle-moi plutôt de ta journée.

Savoir ce qu'elle avait fait de sa journée ne présentait, bien entendu, aucun intérêt notable, mais j'espérais qu'en caressant son penchant narcissique, cela me permettrait d'éluder des sujets que je n'avais pas envie d'aborder, comme mes disques de Britney Spears.

- J’ai fait des recherches sur toi, m’apprit-elle.

C’était le monde à l’envers...

- Et donc? demandai-je, mi-intrigué, mi-inquiet.

Elle m’adressa un regard désespéré.

- Simon... Tu es ami avec ta mère sur facebook!

Elle me dit cela comme si c’était le truc le plus honteux que personne n’ait jamais commis. Sa réaction me parut légèrement démesurée. Il était néanmoins vrai que je ne tirais aucune gloire de cette situation, d’autant que presque la moitié de mes amis facebook étaient des membres de ma famille... Y compris mon oncle Jean-Claude. Un prêtre, c’est pas forcément ce qu’il y a de plus fun comme ami facebook.

- J’ai du chatter avec elle quand je me suis connecté sur ton compte...

Dès les premiers mots de cette phrase, des sueurs froides commencèrent à glisser le long de ma colonne vertébrale. Je présageais le pire. J’étais cependant encore loin du compte.

- … Et elle m’a invité à déjeuner demain, continua-t-elle.

Noooooooooooooon! hurlai-je intérieurement.

 

 

 

Rédigé par Béranger Jouvelle

Publié dans #livre 1

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